J’ai travaillé en remplacement dans un EHPAD en tant que serveuse cet été, ce fut une expérience difficile mais très enrichissante.
C’est un établissement haut de gamme avec des espaces communs décorés avec goût situé en plein centre-ville. J’y ai croisé des familles qui visitaient cette maison de retraite médicalisée pour leur parent en perte d’autonomie. Quels sont les critères sur lesquels se baser pour sélectionner ce type de résidence pour personnes âgées dépendantes ? L’aspect extérieur ? La taille des chambres ? La localisation ? Le prix ? Les menus ? Est-ce suffisant pour se faire une idée précise du lieu où vous finirez vos jours ?
Pourquoi aller en maison de retraite médicalisée ?
Il est rare de quitter sa maison ou son appartement de sa propre initiative pour s’installer dans un EHPAD sachant que cela sera son dernier lieu de vie. En effet, 90% des Français veulent vieillir chez eux selon le baromètre 2017 de la DREES… 66 % ne veulent pas s’installer dans un établissement médicalisé. Cette étude a été réalisée bien avant la pandémie de Covid-19 et le confinement généralisé des personnes âgées, que seraient les résultats d'un tel sondage aujourd'hui ?
J’ai travaillé 1 mois ½ en EHPAD et personnellement je n’ai aucune envie d’y finir mes jours. Contrairement à une résidence services ou une simple maison de retraite, un EHPAD est un établissement spécialisé pour accueillir des personnes dépendantes.
Demeurer avec des personnes âgées affaiblies, dépressives dont certaines développent des débuts de maladie d’Alzheimer, cela n’aide pas à avoir un bon moral au jour le jour. Vous n’avez plus de projets, vous subissez les horaires de l’établissement et la bonne ou mauvaise ambiance des équipes soignantes. Mais lorsque vous ne pouvez plus rester seul(e), il faut reconnaître qu’il n’y a pas beaucoup d’alternatives.
Cette démarche de placer un proche dans ce type d’institution est souvent irréversible car elle survient après plusieurs chutes à domicile ou une longue hospitalisation. Lorsque les aidants sont à bout de force, que les équipes à domicile ne peuvent plus prendre en charge toutes vos demandes, entrer en EHPAD n’est plus un choix.
Quels sont les critères de dépendance ?
Pour « classer » les personnes âgées dépendantes, les professionnels de santé utilisent la grille AGGIR (autonomie gérontologique groupes iso-ressources). Une personne classée GIR 1 est totalement dépendante, alitée, avec des fonctions mentales gravement altérées alors qu’un GIR 6 est une personne autonome.
Les équipes médico-sociales du conseil départemental remplissent cette grille pour déterminer si une personne peut percevoir l’APA, l’aide personnalisée d’autonomie, avec ce type de critères :
- Où vit-elle ? En ville ? En milieu rural ?
- Son logement est-il adapté ?
- Vit-elle seule ? A-t-elle de la famille ou des amis proches ?
- Utilise-t-elle correctement le téléphone ou la téléalarme ?
- Converse-t-elle de façon cohérente, se repère-t-elle dans le temps ?
- Est-elle capable de faire sa toilette seule ? de s’habiller sans aide ? de gérer son traitement médical ?
- Prépare-t-elle seule ses repas ? Est-elle est encore capable de s’occuper de son logement ?
- Est-elle en mesure de gérer son budget ?
- A-t-elle un moyen de locomotion ?
- Quels types d’activités physiques, culturelles ou sociales pratique-t-elle ?
- Quelles sont les aides techniques mises en place ?
Vous pouvez faire votre propre auto-diagnostique de votre niveau de dépendance pour savoir si le moment est venu pour vous ou pour un proche. Une de mes clientes a fait cette démarche cet été. Elle a sélectionné plusieurs établissements pour les visiter. A 86 ans, elle préfère anticiper maintenant que de subir un placement organisé par l’aide sociale.
Car lorsque vous répondez « non » à la plupart de ces questions, vous comprenez qu’il vous faut un autre type d’hébergement et que votre domicile n’est plus adapté.
Quels sont les critères pour sélectionner un EHPAD ?
J’ai lu un livre en 2009 qui traitait de cette problématique « Maman, est-ce que ta chambre te plait ? » de William Réjault avec la collaboration de Christelle Bertrand. J’ai été très émue en le lisant, l’auteur raconte son quotidien d’infirmier dans cette institution haut de gamme à Paris. C’est assez effrayant mais par son témoignage il apprend à ses lecteurs comment sélectionner sa maison de retraite médicalisée.
Jean Arcelin, ancien directeur d’Ehpad a aussi écrit un livre sur ce sujet : « Tu verras Maman, tu seras bien », je vous le conseille. Si j’ajoute les témoignages lus sur Internet et ma propre expérience de bénévole, voici les points qui m’ont semblé importants pour bien sélectionner sa future résidence, proche de votre famille ou de vos amis :
-Faire des visites impromptues dans l’EHPAD présélectionné : quel accueil vous réserve-t-on ? Observez les résidents, les équipes de soignants, est-ce que l’atmosphère est chaleureuse ou tendue ?
- Est-ce qu’il y a une bonne odeur de propre ou sentez-vous des relents d’urine ? C’est un sujet sensible mais la plupart des résidents portent des protections. Si le budget de l’établissement est serré, il est tentant de faire des économies sur ce poste-là. Ne pas changer régulièrement les protections urinaires peut aussi être lié à un manque d’effectif. Dans les deux cas, c’est un très mauvais signal…
-Quel est l’âge moyen des résidents ? (En moyenne, c’est 85 ans).
-Combien de résidents classés en GIR 1 avez-vous ? C’est important pour avoir un ratio autonomie/dépendance.
-Combien de lits avez-vous ? S’occuper de 50 personnes ou de 130, ce n’est pas du tout la même organisation.
-Quel est l’équipement de la chambre (salle de douche privée, lit simple, télévision, Wifi…) et quels sont les tarifs de ces options ?
-Peut-on inviter à déjeuner la famille ou les amis ?
-Est-ce qu’il y a des animations ? Demandez à voir le programme sur un mois pour vous donner une idée précise. L’animatrice fait-elle intervenir des bénévoles pour visiter les personnes qui n’ont pas de famille. Est-ce qu’il y a des sorties organisées ? Est-ce que les personnes en fauteuil sont intégrées à ces visites à l’extérieur ?
-Quels sont les engagements de la direction pour maintenir l’autonomie des résidents, limiter la souffrance morale et physique ? (Appelés projet de vie et projet desoin).
-Est-ce que le personnel est formé pour lutter contre la maltraitance et la douleur ? Pour éviter les chutes ? Pour l’accompagnement en fin de vie ? Pour lutter contre la dénutrition ? (Demandez les dates des formations et le nombre de salariés qui les ont suivies).
-Est-il possible de consulter le registre des plaintes de l’établissement ?
-Quels sont les horaires des repas ? Dans l’Ehpad où je travaillais, les résidents dinaient vers 18h15 car une partie de l’équipe d’aides-soignantes partait à 19h. Il fallait remonter les résidents dépendants avant leur départ. Si un résident prend son petit-déjeuner à 8h00, il reste donc sans manger plus de 14h alorsque la durée préconisée entre deux repas est de 12h00.
-Est-ce qu’il est possible d’avoir accès aux menus du restaurant sur un mois entier ? Qui compose la commission Menus ? (Aurez-vous votre mot à dire ?)
-Quelle est la composition de l’équipe ? Demandez le nombre de salariés qualifiés (médecin coordonnateur, infirmières, kinésithérapeute, psychologue, ergothérapeute, aides-soignantes, auxiliaires de vie, femmes de ménage, lingères, serveuses, cuisiniers….).
Avec cette liste non exhaustive, vous pourrez avoir une bonne photographie des établissements que vous allez visiter. Les responsables vous remettront un contrat de séjour type qui vous permettra de comparer les prix et les prestations entre chaque structure. Il y aura par exemple le coût pour les frais d’hébergement et pour la prise en charge de votre dépendance en fonction de votre classement GIR. Vérifiez aussi les conditions de départ pour ne pas avoir de surprise si vous souhaitez quitter cet EHPAD. Vous avez le droit de changer d’avis.
Si vous souhaitez me poser des questions ou m’apporter vos témoignages, n’hésitez pas à le faire sur la page Facebook ou en commentaires sur le blog. Vous retrouverez mes prestatations d'accompagnement sur www.risaee.fr.