Les aidants représentent entre 8 et 11 millions de français. Le 6 octobre dernier, c’était «leur» journée. Un aidant c’est vous, c’est moi. Parfois il s’agit d’aider ponctuellement un enfant, un parent ou un conjoint qui se retrouve en situation de handicap ou en convalescence.
Parfois, cette situation peut se prolonger.
J’ai eu la possibilité d’aider ma mère à accompagner mon père en fin de vie. Il était hospitalisé depuis quelques jours lorsque le verdict est tombé : lymphome (cancer du système lymphatique). Je travaillais alors comme directrice des Thermes Marins de Perros-Guirec. Toute mon équipe m’a encouragée à revenir à Dieppe assister ma mère. Je tiens aujourd’hui à leur rendre hommage et à les remercier de m’avoir poussée à prendre ce temps.
Ensuite tout va très vite. Il faut organiser les visites quotidiennes à l’hôpital, rencontrer l’équipe soignante, essayer de préparer un retour à la maison pour laisser mon père partir dans les meilleures conditions. Je me vois encore commander un lit médicalisé, aménager l’espace dans une des pièces de la maison tout cela pour rien. En effet, 48h après, il n’a pas été autorisé à sortir pour décéder dans les jours qui ont suivi.
Pourtant, je ne me considérais pas comme une « aidante » à l’époque, cela n’était que provisoire. Je trouvais cela naturel d’être auprès de mes parents dans cette épreuve et je ne regretterai jamais de m’être investie mais aurais-je été capable le faire sur une plus longue durée ?
Qui aide ?
- 58 % sont des femmes
- 76 % ont moins de 65 ans et 43 % moins de 50 ans
- 52 % travaillent
- 86 % aident un membre de leur famille, dont 41 % un de leurs parents
- 34 % viennent en aide à plusieurs personnes, contre 28 % en 2017 (multi-aidants)
- 57 % aident un proche en situation de dépendance due à la vieillesse
- 82 % consacrent au moins 20 heures par semaine en moyenne à leur(s) proche(s)
- 37 % des aidants
- interrogés avouent ne bénéficier d’aucune aide extérieure alors qu’ils sont eux-mêmes souvent âgés
- 67 % des personnes aidées vivent à leur domicile, 21 % vivent en institution, 14% des aidants vivent sous le même toit que les personnes aidées
Dans cet article comme les précédents, j’étudierai plus le cas des seniors aidés.
En 2030, 1 actif sur 4 sera aidant !
Que fait un aidant au quotidien ?
J’ai pu prendre deux semaines de congés payés pour épauler ma mère. C’est une durée souvent plus longue qui attend la majorité des aidants. Lorsqu’on accompagne un proche âgé, cela demande une attention 24h/24. Une journée d’aidant c’est souvent une « seconde journée» comme peuvent le connaître certaines femmes.
Être aidant, c’est par exemple :
- Aider au lever, au coucher, à l’habillement, à l’hygiène corporelle et parfois être présent la nuit ;
- Suivre les rendez-vous médicaux, prendre les médicaments à la pharmacie, coordonner les soins ;
- Préparer les repas après avoir fait les courses ;
- Faire le ménage, la lessive, le repassage, faire quelques travaux d’entretien et du jardinage ;
- Gérer tout l’administratif : les comptes bancaires, le règlement des factures, les déclarations d’impôts ;
- Apporter un soutien moral, jouer et discuter ;
J’ai découvert ce podcast d'Ag2r, "A chaque instant", il illustre bien le quotidien des. Je suis inscrite sur plusieurs groupes Facebook d’aidants comme je vous l’expliquais dans l’article sur la téléassistance. J’y ai lu des témoignages poignants d’aidantes, ce sont souvent des femmes, qui sont à bout de force, certaines n’ayant pas choisi cette situation.
Il faut se rendre compte de la charge mentale et physique que représente cet accompagnement permanent. Il n’y a ni week-end, ni vacances pour les aidants. Qui pourrait bien les remplacer d’ailleurs ?
Du répit pour les aidants
Comment ne pas se perdre dans cette épreuve lorsque l’aide se prolonge mois après mois, année après année ? Les risques majeurs pour les aidants sont l’isolement, la dépression et la précarité financière.
Lorsqu’on aide une personne n’ayant plus aucune autonomie, il n’y a plus de sorties, plus de cinémas, plus de restaurants. Les réunions de famille sont différées car cela semble souvent insurmontable de quitter le logement où toutes les installations sont faites, où l’aidé(e) sait se repérer.
Un aidant fait passer sa santé après celle du proche aidé. Il peut souffrir de problèmes de sommeil, de dos, d’anxiété et il reporte souvent ses propres examens de santé. L’aidé(e) est toujours plus souffrant que soi-même : « cela peut attendre ce rendez-vous chez le dentiste, j’irai plus tard » !
Aider et continuer à travailler n’est pas souvent compatible. L’aidant est parfois contraint de prendre un poste à mi-temps ou moins exigeant en responsabilités donc moins bien rémunéré. Depuis peu un congé aidant a été mis en place.
Accepter de l’aide
D’après ce que j’ai constaté autour de moi, au début, l’aide apportée est occasionnelle. Il y a, ensuite, comme un engrenage qui se met en place.
Cela peut commencer par aider son conjoint à mettre son manteau ou ses chaussures, ensuite vous allez faire les courses seule car il marche très lentement, puis ce sont les repas à préparer et ainsi de suite. C’est peut-être pour cette raison que les aidants n’appellent pas à l’aide ? L’aidant ne s’aperçoit pas à quel point il prend le quotidien en charge et pense pouvoir assumer seul(e). La famille ou les professionnels entendent alors : « tant que je peux le faire, ce n’est pas la peine d’appeler une femme de ménage/une aide-soignante/un jardinier… ».
Tous ces dispositifs sont pourtant prévus pour cela, aider l’aidant. Y faire appel ne devrait pas être vécu comme un renoncement. Pourquoi vouloir tout faire lorsqu’on est soi-même déjà âgé(e) ? Pourquoi culpabiliser ? Le besoin de ne dépendre de personne, de ne pas appeler à l’aide, de ne pas avoir à réclamer une allocation devrait céder le pas au profit de son propre bien-être, de sa santé morale et psychologique.
Il y a un risque de devenir maltraitant à prendre tout en charge pendant des années ou même de mourir avant la personne aidée à force de s’épuiser. L’aidé, comme l’entourage familial, ne se rend parfois même pas compte des efforts fournis par son conjoint
Accepter de l’aide, c’est aussi pouvoir rester chez soi le plus longtemps possible en meilleure santé et accompagner son conjoint dépendant plus sereinement. Parfois, l’aidant est si épuisé que la seule issue possible c’est un placement en Ehpad ce qui est encore plus culpabilisant.
Se faire aider n’est pas un abandon ni une défaite, c’est passer le relais avant que la situation ne se dégrade.
Quels sont les dispositifs d’aides ?
Dans cette fiche, vous trouverez tous les interlocuteurs que vous pouvez contacter quand la situation vous semble intenable. Il y a bien sûr le médecin de famille, la mairie, le CCAS, les CLIC, les assistantes sociales du Centre Médico-Social, les aides-soignantes et les infirmières du SSIAD, les aides ménagères, les sociétés de portage de repas, les associations de bénévoles… tous apportent un soutien, une logistique qui, une fois en place, soulage l’aidant. Elle rend au conjoint sa vraie place d’époux ou d’épouse
Nous avons déjà abordé le rôle de l’ergothérapeute pour faire un diagnostic du domicile et faciliter aussi l’adaptation du logement. Une douche au lieu d’une baignoire permettra certainement au conjoint de continuer à faire sa toilette seul par exemple.
Des cafés des aidants ont été mis en place en France. L’association Siel Bleu organise des séances de sport adaptées à tous qui peuvent aussi améliorer l’état de santé des aidés.
Dans ma région il y a la « Bouffée d’air » organisée par le C.L.I.C. de Granville Terre et Mer et Villedieu Interco. Chaque mois, une après-midi est dédiée aux aidants et aux aidés autour de thématiques comme l’échange de talents ou des visites contées. Des fonds sont mobilisés pour permettre les déplacements vers le lieu de réunion ou d’organiser une garde à domicile si l’aidé ne peut se déplacer. C’est une après-midi de répit pour rencontrer d’autres aidants, les membres d’association comme France Alzheimer ou France Parkinson et partager une activité.
Ces associations comme Vivre et Vieillir dans son village proposent aussi des accompagnements avec des groupes de paroles, des formations d’aidants et des séjours de répit. Les caisses de retraite, la MSA avec Solidarité Transport ont aussi des programmes d’aide à la mobilité. Voici le numéro unique à retenir pour avoir plus d’informations, Centre Médico-Social Granville Terre et Mer : 02 33 91 14 00 !
Les accueils de jour peuvent aussi soulager les aidants en laissant quelques heures le proche dans une structure adaptée. Les Maisons d’Accueil Temporaire, MAT, sont aussi des structures qui permettent d’accueillir des personnes dépendantes sur plusieurs jours et laisser l’aidant se reposer.
Depuis plusieurs années un projet de ce type était prévu à Carolles, sur le territoire de Granville Terre et Mer. Malheureusement la nouvelle municipalité n’a pas validé ce projet à l’emplacement prévu, un nouveau dossier sera déposé. Avec seulement 20 000 places en M.A.T. et en Ehpad en France et un vieillissement plus important que sur les autres départements de Normandie, c’est un vrai besoin sur notre territoire.
J’espère que cet article vous aidera à comprendre le rôle des aidants et si dans votre famille vous connaissez une personne dans cette situation, appelez-la, allez la voir, proposez-lui de l’aide, soutenez-la.
Si je n’avais qu’un conseil pour un aidant : ne restez pas seul(e), faites-vous accompagner.